Cocteau Twins : Critique de l’album Head Over Heels

Au début, je ne m’entendais pas du tout avec Cocteau Twins. Quand Fou amoureux sorti en octobre 1983, le DJ de la radio BBC John Peel a joué l’intégralité de l’album dans son émission. En écoutant ce soir-là dans ma chambre d’étudiant, les vaporisations et les gazouillis m’ont frotté dans le mauvais sens.

J’ai décidé de donner une autre chance à ce disque après avoir lu une critique élogieuse dans le NME. Soudain, j’avais la clé du jardin secret. Ce qui avait d’abord semblé grandiloquent et creux est devenu caverneux, comme entrer dans une grotte scintillante de stalactites. L’inconstance du son de la guitare, si frustrante au départ, devient enivrante, comme un parfum entêtant. Quant à cette voix hurlante : c’était simplement le lutin qui serait habiter un tel pays des merveilles, chantant dans une langue étrangère aussi passionnée qu’incompréhensible.

Fou amoureux est le titre parfait pour ce disque. Vous n’êtes pas censé cogiter ou extraire une signification littérale profonde de ces sons, comme c’était le cas avec tant de post-punk dans les années précédentes. Vous êtes censé tomber dans son bonheur en cascade.

« Ead over heels » décrit également l’état d’esprit de ses créateurs, le guitariste Robin Guthrie et la chanteuse Elizabeth Fraser. Guthrie l’a décrit comme un album de chansons d’amour. Si tel est le cas, ils sont voilés et opaques, des allusions scintillantes de temps en temps dans un titre de chanson égaré (« My Love Paramour ») ou des paroles rares et intelligibles (« Il n’y a qu’un cheveu entre nous »). La plupart du temps, ce sentiment se manifeste de manière non verbale, comme c’est le cas presque toujours avec le chant de Fraser, à travers l’exaltation pâmée de sa voix.

La romance a éclaté dans une discothèque. Robin Guthrie, guitariste en herbe et DJ occasionnel à l’Hôtel International de Grangemouth, en Écosse, faisait tourner des disques de groupes proto-gothiques comme Birthday Party, des airs qui remplissaient complètement la salle. Sauf cette fille avec des cheveux surprenants et des bijoux en os de poulet. Guthrie pensait que quelqu’un qui pouvait danser de manière expressive pourrait être capable de chanter.

Pendant presque toute leur carrière, les Cocteau Twins ont en fait été des triplés : Simon Raymonde a endossé le rôle de bassiste peu après la sortie de Fou amoureux, un rôle occupé au début par l’ami de Guthrie, Will Heggie. Mais Heggie avait arrêté au moment où il s’agissait d’enregistrer Fou amoureuxalors le couple amoureux a réalisé l’album seul, ce qui a sûrement contribué à son atmosphère d’intimité presque émouvante.