Khotin: Critique de l’album Release Spirit

Dylan Khotin-Foote oscille entre lo-fi house et ambient miteux depuis près d’une décennie maintenant. Sur quatre albums sortis entre 2014 et 2020, le musicien électronique canadien connu simplement sous le nom de Khotin a établi une palette remarquablement cohérente, ne développant pas tant son style que s’y enfonçant davantage, comme on pourrait le faire dans un canapé usé mais exceptionnellement confortable. Il aime les coups de batterie étouffés, les sous-basses moelleuses et les pads délavés du Casio SK-1, un clavier d’échantillonnage de base légendaire des années 1980. Sur son premier LP, Bonjour le monde, Khotin s’est fortement appuyé sur les boîtes à rythmes Roland vintage et les grooves house classiques, mais dans les années qui ont suivi, il a ralenti le tempo et jeté une épaisse couverture sur les percussions sans trop bricoler l’essence de son son. Ses humeurs sont aussi invariables que sa boîte à outils : rêveuse, légèrement distraite et incontestablement douce-amère, mais en filigrane avec quelque chose qui ressemble à de l’optimisme.

Libérez l’espritle premier album de Khotin depuis les années 2020 Vous trouve bien, fait suite à un déménagement de Vancouver vers sa ville natale d’Edmonton, en Alberta, mais il est difficile de discerner quel impact, le cas échéant, ces 700 milles ont pu avoir sur sa musique. Une suggestion de fantaisie enfantine imprègne la musique; des pistes en forme de flûte tracent des cercles paresseux dans l’air, et les contours spongieux de ses synthés rappellent parfois Play-Doh ou Silly Putty. Comme Boards of Canada, il utilise des effets de distorsion de bande presque subliminaux à des fins vivement nostalgiques, et des bribes autobiographiques jonchent l’album comme des instantanés jaunis que l’on pourrait décoller des pages d’un album photo à reliure spirale. Dans le premier « HV Road », il sort un enregistrement d’un séjour en famille au lac Okanagan en Colombie-Britannique, les voix de ses frères et sœurs cadets saignant à travers le chant des grillons. (« Pourquoi enregistrez-vous encore ? » demande l’un d’eux avec un dédain à peine voilé.) Et « 3 pz » emprunte sa voix en langue parlée étrangement décontenancée et fortement accentuée (« Tu as taché ton costume… Oh mon dieu, tu as taché ta robe … Ce type est tellement ennuyeux – tu m’énerves, tu comprends ? ») d’après une cassette d’apprenants d’anglais qu’il a trouvée chez ses grands-parents, qui ont immigré de Russie dans les années 1980.

Les pulsations de l’album sont pratiquement cryoniques, mais la musique est étonnamment vivante. Les boîtes à rythmes lentes et les breakbeats langoureux sont souvent agrémentés de détails argentés et d’accents métalliques en cascade. Sur « Lovely », un arpège soigné et sonore brode des volutes autour d’un rythme qui marche comme des bottes dans la neige fondante ; dans « Life Mask », un paysage calme de piano à la Harold Budd et de chants d’oiseaux ambiants est interrompu par des tornades rapides de dub delay. Partout où vous écoutez, des rythmes qui se chevauchent (effets de trémolo instables, charleys pitter-pat, échantillons vocaux saccadés) se répandent et se heurtent, comme des ondulations à la surface d’un lac.

Certaines des meilleures pistes utilisent le son mercuriel du TB-303 comme principe d’organisation. « Home World 303 » déroule des lignes acides contrapuntiques, un squelchy et un ping ; « Computer Break » mène à un mouvement de bascule. C’est un ajout intelligent au livre de jeu – une musique aussi floue que celle de Khotin bénéficie d’un point de focalisation. Comme ses disques précédents, le vaporeux Libérez l’esprit c’est tellement uniformément joli qu’il ne laisse pas toujours une forte impression. Mais deux pistes indiquent de nouvelles directions potentielles pour le son de Khotin. « Techno Creep » commence sur le gazon froid et engourdi d’Andy Stott, mais – réchauffé par la guitare des Baléares et les synthés new-age – il dégèle et fleurit au fur et à mesure, comme une toundra arctique qui devient tropicale. « Fountain, Growth » commence par une transe acide au ralenti avant que la voix de la Montréalaise Tess Roby ne s’estompe à portée de voix, ses soupirs réverbérants aussi merveilleusement énigmatiques qu’Elizabeth Fraser des Cocteau Twins. C’est une distillation dream-pop du son classique de Khotin et une suggestion que ce maître de l’atmosphère pourrait avoir un avenir dans de vraies chansons.

Tous les produits présentés sur Pitchfork sont sélectionnés indépendamment par nos éditeurs. Cependant, lorsque vous achetez quelque chose via nos liens de vente au détail, nous pouvons gagner une commission d’affiliation.