À travers Diable de poussière, un double album électronique théoriquement ambiant, Naemi, un Kansan désormais basé à Berlin, crée des chansons qui montent et descendent doucement. Chacun a un point de vue fort mais un sentiment fragile, comme s'ils avaient commencé comme des déclarations acerbes avant que le producteur ne les réduise à néant. En effet, comme le dit Weather.gov de manière plutôt poétique à propos du phénomène de tornade qui donne son nom à l’album, chaque chanson arrive dans le brouillard et lorsqu’elle est « épuisée ou que l’équilibre est rompu », « elle s’effondre et se dissipe ». C'est un album doux et magique, grand par son ambition et petit par sa taille, ce qui est, à mon avis, la bonne dose de chacun.
Naemi, qui produisait auparavant sous le nom d'Exael, est membre d'un groupe de musiciens du Kansas et d'ailleurs, notamment Ulla et Huerco S., qui apparaissent tous deux sur l'album, travaillant dans le côté le plus expansif de la musique électronique. Attendez-vous à entendre des panoramas sonores panoramiques, des synthés ping-pong, de lents faisceaux laser fondant sur des charleys étouffés, des guitares acoustiques transformées en dissonance fractale. Ces acoustiques décrépites partagent les principes anti-mélodies de la musique no wave mais pas l’abrasivité. L'album est décalé, mais il s'écoute facilement. La souplesse fait partie de la démarche.
Diable de poussière est l'opus de ce son, avec Naemi réunissant en invités vedettes une rangée d'assassins de jeunes expérimentateurs, des gens talentueux qui parsèment les Bandcamps de Motion Ward ou 3 XL, dont le responsable du label, Shy, apparaît sur cet album. Ils interprètent toute une gamme de talents musicaux, de la poésie orale, grattent une guitare acoustique ou roucoulent les plus doux des riens sur des rythmes qui gargouillent, bourdonnent et palpitent.
L'album s'ouvre avec « It Feels So Good » avec « Erika », également connue comme la musicienne R&B assez populaire Erika de Casier ; Elle est tellement plus connue que le reste des artistes qu'on a l'impression qu'ils pensaient qu'il serait gauche d'utiliser son nom complet – un son flou. La chanson aurait facilement pu être instrumentale ; à lui seul, ce serait un joli morceau de musique d'ambiance, fait de la version la plus douce de quelque chose entre le cri d'un bébé baleine et le son numérisé d'une trompette mélangé à un scintillement numérique semblable à celui d'une harpe. Mais avec le chant de De Casier, qu'elle interprète suffisamment lentement et doucement pour ressembler presque à un chuchotement, la chanson passe de relaxante à séduisante. Brian Eno ne pourrait jamais. « It Feels So Good » est probablement ce qui se rapproche le plus de l'album d'une « chanson ». C'est un choix judicieux de le faire ouvrir l'album, une véritable immersion dans la chaleur de l'album avant de passer aux 13 chansons suivantes qui se confondent au fur et à mesure qu'elles entrent et sortent de leur cohésion. Les idées sont développées, actualisées et abandonnées. Il n'y a pas toujours beaucoup de développement, mais pas beaucoup de préciosité non plus ; la curiosité règne.