Au cours des sept années qui se sont écoulées depuis le dernier album de Tyvek, les punks de Détroit ont fouillé leurs archives. Ils ont réédité une cassette rare de 2009 et ont sorti un album live dans lequel ils ont dépoussiéré et déchiré certaines de leurs premières chansons. Parmi ces coupures profondes figurait « Future Junk » de 2007, un joyau à feuilles persistantes dans lequel Kevin Boyer crie sur le train-train quotidien de monter et descendre l’autoroute John C. Lodge. Tyvek revient au Lodge sur « M-39 », un hit remarquable de leur cinquième album déjanté, Hors sol. Sur un riff de guitare en cascade et croustillant, au milieu d’une couverture de fracas de cymbales incessants, la performance vocale directe et sans éclat de Boyer contribue à transformer l’autoroute en une colonie psychédélique ciselée dans le béton. Il tord la même poignée de mots en nœuds de sorte que lorsqu’il finit par prononcer l’expression « en gros sur la Loge », elle atterrit comme une punchline.
Boyer propose des repères et des indices, mais sinon, ses images ressemblent à un puzzle dont la moitié des pièces sont aspirées dans le vide. Le son de la guitare est toujours aussi saccadé et rigide, et il y a un acharnement dans le séquençage qui est présent depuis les deux ou trois derniers albums de Tyvek. Chaque chanson se répand rapidement dans la suivante et le groupe se calme rarement. « Return to Format » et « Rhythm / Pattern » sont délabrés alors que Boyer crache ses mots de manière percutante tandis que le groupe se précipite derrière lui. Il y a un moment dans « Going Through My Things » où il semble soudainement réciter l’étiquette d’une vieille chemise : « LOW tumble dry, LOW tumble dry, LOW », crie-t-il au rythme approximatif du tambour qui tourne d’un sèche-linge. Tyvek excelle dans cet étrange équilibre entre la rigidité d’une grille et le sentiment que tout peut s’effondrer à tout moment.
Bien que Tyvek ait toujours été une porte tournante de contributeurs (malgré Boyer), l’incarnation actuelle est stable depuis quelques années maintenant. Il est palpable à quel point ils se sont liés l’un à l’autre. Boyer et Shelley Salant sont tous deux à la guitare, et de nombreuses chansons récompensent une écoute attentive pour leurs leads entrelacés et improvisés. La section rythmique est forte, ce qui est attendu de la part de deux patrons de la scène DIY du sud-est du Michigan, le bassiste Alex Glendening (Deadbeat Beat) et le batteur Fred Thomas (trop de groupes à énumérer). Le nouvel ingrédient le plus évident est Emily Roll, la compagne de Salant dans le trio art-punk XV. Leur saxophone se plie sans effort, sans jamais dominer avec un skronk écrasant ou un voyage long. Roll reflète la nature pointue et saccadée des guitares : un souffle ici, quelques notes supplémentaires là. C’est une nouvelle texture et un contraste légèrement aigre avec le crochet principal. En parfaite adéquation avec l’écriture de Boyer, c’est le type de désorientation le plus excitant.