Actrice : Critique de l'album Statik | Fourche

Une énergie d’appréhension charge l’atmosphère juste avant qu’un orage n’éclate. La lumière semble fausse, les ombres effacées par la teinte verdâtre et maladive du ciel. Vous pouvez sentir l’air s’éclaircir à mesure que la pression barométrique baisse, vous préparant aux prochaines rafales de vent et aux torrents de pluie ou de grêle épineux. Ces moments semblent durer éternellement, étirant le temps jusqu'à ce que la tempête arrive enfin, offrant un répit à la tension.

Ce sentiment nerveux, la mâchoire serrée, sature le séduisant Statistique, le dernier album de Darren Cunningham en tant qu'actrice. C'est un disque doux et troublant, dégageant tranquillement son aura paranoïaque comme un fruit en décomposition dans une cuisine bien équipée. Même les plus beaux passages de l'album – et ils sont nombreux – bougent avec un slink anxieux, comme si Cunningham avait composé ces morceaux penché, les yeux rivés, ses épaules effleurant ses oreilles. La majorité des Statistique est issu d’une période ininterrompue de productivité que Cunningham décrit comme un « état de flux étendu », et cette concentration profonde lui confère une cohésion qui manquait à certains de ses disques précédents. Chaque chanson semble naître de la précédente, comme une barrière de corail s'épanouissant en un monde étrange et singulier.

Cunningham dissimule la plupart de ses sons sous une couverture de sifflement, transformant tout en une brume floue. Il utilisera souvent la compression sidechain pour sculpter les grosses caisses, leur donnant l'effet de signaux ferroviaires stroboscopiques par une nuit brumeuse. Il y règne une atmosphère onirique omniprésente, comme si chaque instrument était joué dans un espace différent, tous parcourant des distances importantes pour arriver dans vos écouteurs. Les premiers moments ambiants de « System Verse » scintillent comme une pollution lumineuse à l’horizon, des nappes de synthé vaporeuses flottant autour d’un rythme de basse trouble. Au fur et à mesure que la chanson apparaît, on a l'impression qu'elle s'approche lentement – ​​presque de manière menaçante –, se fondant dans une piste techno sourde mais propulsive de 140 BPM. Il peut être difficile de calculer exactement ce qui se passe à un moment donné sur Statistiquemême si les éléments sont globalement familiers.

Une quantité de tension désorientante donne très peu de résolution. Les séquences de synthétiseur se tortillant dans « Ray » se chevauchent mais ne semblent jamais se toucher, leur impasse circulaire renforcée par le clic insistant des doubles croches de charleston. « Cafe del Mars » présente une cascade délirante d'arpèges accentués par un synthétiseur à cordes, créant l'anticipation d'un changement d'accord qui ne vient jamais. Lorsque Cunningham propose une pause dans la pression, il a tendance à l’enfouir profondément dans le mélange. La douce mélodie de guitare bridée de « Dolphin Spray » adoucit le côté saccadé de la chanson, mais il faut faire des efforts pour la comprendre. Tous les moments de sérénité sont éphémères, au risque constant d’être éclipsés par la peur imminente.