Les singles complets de Sceptre joue comme un guide sur la façon de chanter une chanson. Warwick a évidemment le pouvoir de livrer les grands moments, mais ce sont les virages plus petits et plus silencieux qui ressortent, lorsqu’elle considère les implications des paroles et teste le poids que la chanson peut supporter. Écoutez sa déconstruction sauvage de 1965 de « You Can Have Him », qui avait déjà été un succès pour Roy Hamilton. Une petite armée de batteurs et de percussionnistes martèle des rythmes qui se chevauchent de manière complexe, mais elle mesure soigneusement sa voix, stabilisant la chanson alors même qu’elle injecte un sarcasme sournois à son célèbre baiser. Elle ouvre la face B de 1966 « In Between the Heartaches » dans un fausset délicat, presque cassant, avant de passer à son registre grave, et elle tempère son phrasé pour flirter avec le mètre et repousser l’arrangement. Elle révèle l’énormité des émotions qui la submergent tout en suggérant que son chagrin ne se termine pas avec les notes finales de la chanson. Sa douleur vient par vagues; elle se prépare toujours.
Toutes les chansons ne sont pas diffusées Les singles complets de Sceptre est un air de Bacharach-David, mais telle est la nature de leur collaboration – son intimité, sa longévité, son succès – que chaque morceau sonne comme s’il coulait de la même source. Bacharach arrange sa voix comme si c’était un autre instrument de l’orchestre, et David pense les paroles comme des prières. C’est peut-être le thème unificateur de son passage chez Sceptre : les chansons pop comme prières de compassion, de consolation et d’engagement. Il y a « Wishin’ and Hopin' » et « I Say a Little Prayer », bien sûr, mais il y a aussi « What the World Needs Now » et même « Walk On By ». « Dans la chapelle de mon cœur, je prie pour que nous ne soyons pas séparés », chante-t-elle sur la face B de 1963 « Please Make Him Love Me », qui ne fait pas partie des compositions les plus inspirées de Bacharach et David. C’est un pari d’écriture de chansons pour eux, un thème à dérouler en quelques couplets et un pont, mais Warwick approfondit l’idée et parvient à transmettre le sentiment d’être englouti par l’amour et la peur à la fois.
Quelle part de vous-même devriez-vous donner quand vous êtes amoureux ? Combien devez-vous garder en réserve ? Pouvez-vous être transformé et garder une partie de vous-même ? Telles sont les questions cruciales sur lesquelles Warwick se pose Les singles complets de Sceptre, et chaque chanson se justifie en offrant une réponse légèrement différente. Mais ce sont aussi des questions auxquelles les femmes étaient confrontées au cours de cette décennie, alors qu’elles jouissaient de plus de liberté loin de chez elles – dans les bureaux, dans les clubs, dans les charts pop – et étaient constamment réprimandées pour cela. Ce dilemme fait de son single de 1964 « A House Is Not a Home » à la fois un artefact de son temps et une chanson qui semble intemporelle. David écrit des paroles déchirantes et Bacharach fournit de grands gonflements orchestraux, mais vous ne ressentez leur présence que de manière subliminale. Warwick domine chaque mesure, investissant chaque plaidoyer de gravité et de désespoir. « Quand je monte les escaliers et que je tourne la clé », chante-t-elle dans l’un de ces moments qui vous oblige à arrêter tout ce que vous pourriez faire d’autre, « Oh s’il vous plaît soyez là, toujours amoureux de moi. » Elle comprend le drame derrière ces négociations : Aimer et être aimé, c’est inviter l’incertitude et le trouble dans sa vie, mais ne pas aimer et surtout ne pas être aimé, c’est ne pas exister du tout.
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