Hannah Frances : Critique de l'album Gardien du berger

Mais pour une grande partie Gardien du berger, les modèles instrumentaux intuitifs de Frances ne sont que des tremplins pour des structures de chansons étranges, méthodiquement construites par Frances et le producteur et multi-instrumentiste Kevin Copeland. Il y a plus qu'une touche de prog distingué autour de son noyau folk, plaçant Frances quelque part parmi Joanna Newsom, Jeff Buckley et Fleet Foxes. L'ouvreur « Bronwyn » monte et descend, se secoue et saute comme sur un carrousel délabré, toujours sur le point de glisser en enfer ou de monter au paradis. Des volutes enchevêtrées de saxophone s'enroulent autour de l'entretoise en forme de dub de « Haunted Landscape, Echoing Cave » plus proche, le tout se brouillant dans un rêve cachemire après un bref intermède cool-jazz. Frances a souffert d'un blocage de l'écrivain avant que ces chansons n'arrivent précipitamment ; leur portée et leur flexibilité sont des dons d'endurance, de persévérance.

Cette leçon est écrite dans chaque chanson ici, alors que Frances lutte contre la longue emprise du chagrin et avec sa conviction qu'il se relâchera progressivement. Frances revient à un petit ensemble d'images – grottes, bergers et leurs moutons, côtes et rivières – à plusieurs reprises tout au long de ces 37 minutes, lui permettant de dresser une carte de ses propres progrès. Dans « Bronwyn », c'est la perte qui déchire sa poitrine, élargissant sa cage thoracique jusqu'à ce que son corps se déforme comme les tambours déformés sous elle ; deux chansons plus tard, dans « Woolgathering », elle respire un nouvel amour et une nouvelle vie. « Donnez-moi le temps de libérer mes poumons », chante-t-elle, comme Vashti Bunyan dans une brume électrostatique, « les côtes se relâchent ». Frances dit qu'elle séquence souvent ses albums dans l'ordre dans lequel elle a écrit les chansons ; voyez-la avancer petit à petit dans sa propre vie.

Frances pourrait apparaître comme un précieux émissaire du yuppiedom sylvestre New Age, coincée quelque part entre son studio de yoga préféré en ville et son stand de ferme préféré à la campagne. Après tout, elle se décrit elle-même comme une « artiste du mouvement » qui réalise des vidéos musicales sérieuses au milieu de paysages luxuriants à feuilles persistantes et qui exécute des danses interprétatives sur ses propres chansons dans la quasi-obscurité de la péninsule olympique. « Comme mon écriture est inextricable de ma parenté avec la terre », écrivait-elle récemment dans son bulletin d'information, « je tisse des images et des archétypes écologiques pour raconter ma mythologie personnelle de manière plus expansive et plus riche. »