Purelink : Critique de l’album Signs | Fourche

Le premier single de Purelink aurait pu être une machine à voyager dans le temps. Un morceau, « Head on a Rotating » de la face B, invoquait la drum’n’bass des années 90 d’artistes comme Photek et Source Direct, dans laquelle les breakbeats se brisaient comme des éclats de verre sur des flaques de basse d’encre. « Maintain the Bliss » de la face A était plus flou mais encore plus concentré sur ses points de référence contemporains. Porté par des nuages ​​vaporeux de synthé, avec des filtres poids plume balayant de douces explosions de sub-basses, il rappelait une souche de techno ambiante perfectionnée il y a un quart de siècle par des artistes comme Vladislav Delay, Deepchord et un groupe peu connu. L’artiste de Glasgow nommé Pub, dont l’épopée dub-techno « Summer » de 2000 a dessiné les plans de la rêverie béate de Purelink.

Aussi obscurs que puissent paraître ces points de référence, ils méritent d’être notés car ils indiquent à quel point la vision de Purelink est spécifique. Tous encore dans la vingtaine, les membres du trio de Chicago – Tommy Paslaski (alias Concave Reflection), Ben Paulson (alias Kindtree) et Akeem Asani (alias Millia) – semblent être des connaisseurs d’une souche raréfiée de techno expérimentale de l’ère de l’an 2000. Mais là où de nombreux acolytes de styles révolus travaillent sous l’angoisse de l’influence, « Maintain the Bliss » semblait facile. Il aurait facilement pu s’agir d’un classique perdu sauvé d’un DAT de 25 ans.

Le nouvel album Panneaux garde son regard tourné vers l’avant-garde numérique de la fin des années 1990 et du début des années 2000. Les contours scintillants de l’ouverture « In Circuits » rappellent Jan Jelinek et Oval, tandis que les rythmes légèrement dubwise et les crépitements lointains rappellent Pole. Dans un sens, ils arrivent à l’heure. Avec autant de jeunes musiciens réanimant les squelettes du shoegaze, du nu-metal, de l’alternative des années 90 et de la jungle, il va de soi que quelqu’un accorderait la même attention à ces sons marginaux de la même période.

Mais Panneaux ne semble jamais expressément rétro. C’est peut-être parce qu’il y a si peu d’associations culturelles évidentes à attacher à ces sons en premier lieu : le mouvement dit des clicks + cuts a toujours été l’un des secteurs les plus anonymes de la musique électronique, ses praticiens discrets s’obstinant à se cacher derrière leurs écrans d’ordinateurs portables. Mais ce qui évite surtout au disque de paraître rétrospectif, c’est la beauté des résultats. L’ambient et la dub techno ont toujours mis le plaisir sensoriel au premier plan, et Purelink excelle dans ce domaine. Panneaux est un bain de vapeur virtuel d’accords brumeux, de basses massantes sur la poitrine et de textures somptueuses et ultra-vives.

Ils maintiennent une ambiance uniforme de doux repos tout au long des 39 minutes de la sortie. Il n’y a rien de plus insistant qu’un rythme à quatre sur la piste ; là où les grosses caisses apparaissent, elles n’atterissent que de temps en temps, offrant le moindre soupçon de pulsation. Au lieu de cela, le mouvement vient de la façon dont les synthés et les filtres tourbillonnent, s’enroulant comme de la mousse le long du rivage. Les morceaux ont un ton largement monochromatique, à l’exception de « 4k Murmurs », dont la progression d’accords glissants est le point culminant émotionnel du disque. Dans le même temps, Purelink s’élève au-dessus des producteurs de chillout plus ouvertement fonctionnels grâce à sa compréhension étrange du détail. Ces pistes ont tendance à s’asseoir confortablement en arrière-plan ; en fait, leurs rythmes apaisants et leur volume feutré rendent difficile la concentration sur eux pendant longtemps. Mais de temps en temps, un son jaillit comme une balise : une cymbale ride frappée avec précision, ou une tintinnabulation rapide, ou un souffle inconnu traversant le mix. La musique hypnotique de Purelink est efficace pour vous endormir, mais elle récompense les occasions où vous vous redressez et vous mettez au garde-à-vous.