Si Reason a hérité de quelque chose de son ancien compagnon de label TDE Kendrick Lamar, c’est un épuisement profond. à travers bon gamin, maAd city et Pimper un papillon, la lassitude de Lamar soulignait les sombres horizons de ses sujets : des garçons aux yeux brillants tombant dans un machisme maussade, les insidieux catch-22 face aux hommes noirs dans les villes américaines. Sur son deuxième album, Porches, Reason renonce au contexte assidu des opus de Lamar, cousant des thèmes et des décors familiers dans un patchwork impressionniste. En contournant les configurations conventionnelles et les histoires d’origine, Reason tente une urgence plus diaristique, mais le cadre abrégé émousse également les révélations émotionnelles du disque.
Porches‘ les monologues les plus importants se regroupent, concentrant leurs idiosyncrasies. « Appelez-moi! » est une méditation convaincante et cinétique sur l’envie, une performance vocale accomplie malgré une exposition maladroite (« Niggas me regarde comme si j’étais un rêve, c’est seulement parce que j’ai atteint cet endroit/fictif que les gens appellent le succès, et maintenant ils en ont besoin « ). Un intermède relie la chanson à « Gang Shit ! » qui oscille entre les perspectives à la première et à la deuxième personne pour dramatiser la divergence des pairs de l’enfance. L’immédiateté rappelle la tactique éprouvée de Lamar, mais Reason dépend trop des sauts; c’est comme écouter une conversation téléphonique à mi-parcours.
Bien que l’écriture dense des chansons récompense les écoutes répétées, Porches est assombrie par une vitrine atmosphérique: avertissements rauques des anciens du quartier, messages vocaux de copines harceleuses, querelles de territoire et affronts perçus. Ces tropes seraient aléatoires s’ils n’étaient pas le genre de choses qui sont apparues sur les albums de Kendrick et YG il y a dix ans (sans parler des albums Xzibit et Jayo Felony 15 ans auparavant). Même le concept global de l’album – une métaphore de l’espace liminal posant le porche comme un portail entre les rues et la vie intérieure – ressemble à une version guindée de « Swimming Pools » et « Money Trees ». Il fait des gestes vers quelque chose que ce n’est pas, suggérant un malaise face à la compétence modeste du disque.
« Une pause hivernale brisée! » est la première vedette, une tranche noueuse de funk de la côte ouest qui ne serait pas déplacée sur un projet Schoolboy Q ou ICECOLDBISHOP ; « Envoyez-vous 2 l’au-delà! » est un récit fluide et dynamique rehaussé par une production et une ingénierie vocale fantastiques. À partir de là, l’album passe à une demi-heure de touches sombres et d’âme de tamia mélasse, de chansons chargées de comparaisons laborieuses («Je dois couvrir la maison comme des arbitres») et de platitudes agitant les doigts («C’est le putain de problème avec notre peuple /Parfois on ne rêve pas assez ») digne d’un post LinkedIn. Porches met en lumière la livraison agile de Reason à travers une large gamme de modèles de rimes noueux et déséquilibrés, mais plutôt que de mettre en valeur sa polyvalence, le cours d’enquête le rend caméléon.
ça vaut le coup de revoir Voilà, la mixtape de 2017 qui a suscité l’intérêt de Top Dawg en premier lieu. Assemblé avec des rythmes provenant de YouTube, il est profondément ressenti sinon assez profond; les ressources du label auraient pu garantir des placements de producteurs et aiguiser la vision de Reason. Il va sans dire qu’il y a un trou en forme de Kendrick dans la gamme TDE. Mais sur Porches, Reason rappe comme si la lumière du jour était derrière lui, devenant la proie de l’inversion narrative qui tourmente tant de disciples de J. Cole – la supposition que l’investissement d’un label assure le triomphe artistique. Un contrat d’enregistrement est sûrement un événement culminant, mais pour le public, c’est un prélude hors écran. L’action se situe entre le générique d’ouverture et le générique de clôture.