L’héritage musical de Seaming To ne crie pas immédiatement à la rébellion. La chanteuse, compositrice et multi-instrumentiste née à Londres est issue d’une famille de pianistes de concert, et elle a suivi leur chemin au Royal Northern College of Music de Manchester, où elle a suivi une formation de chanteuse d’opéra. À partir de là, elle s’est lancée dans une série de collaborations prestigieuses, apparaissant sur plusieurs albums avec le groupe Homelife, et plus tard sur l’album de Robert Wyatt en 2007. opéra comique. Mais la subversion est au centre de Collecteurs de poussière, un album de compositions excentriques et d’une profondeur émotionnelle importante. C’est le mariage le plus réussi de To entre l’iconoclasme avant-gardiste et la tradition classique à ce jour.
Sur son EP de 2006, Soda lent (pour nous), Seaming To a présenté les caractéristiques déterminantes de sa musique impressionniste : des lignes vocales aventureuses, des changements de genres dramatiques et des mélodies chaleureuses construites à partir de cordes souples et d’un piano délavé. Son premier album complet, 2012 Couture, a ajouté des éléments d’horreur mystique au mélange. Au cours de la décennie qui a suivi cette sortie, elle s’est tournée vers les compositions cinématographiques et théâtrales, mais Collecteurs de poussière reprend là où son prédécesseur s’était arrêté : un opus avant-pop qui enchaîne des thèmes abstraits et cérébraux avec un esprit subtil et un sens du surnaturel.
Collecteurs de poussière vire en douceur et rapidement dans son cadre narratif ambitieux. « Blessing » est une méditation obsédante sur le pouvoir universel de Dieu, comme un psaume et une incantation à parts égales, et To souligne ses paroles avec un chœur d’opéra de voix multipistes pleines de drame chatoyant. Dans « Tousles », elle s’adresse à un amant avec des invitations étranges (« Pincez mon cœur, mettez des charnières dessus, afin que vous puissiez m’ouvrir facilement ») alors que des oscillateurs ruisselants entraînent une toile de fond en constante expansion. « Brave » se penche sur un sentiment de malice, avec des overdubs chuchotants et des synthés analogiques plinky ajoutant une touche fantaisiste.
Que l’ambiance soit ludique, intense ou carrément troublante, To fait constamment de la place à l’introspection. Sur « Les plaisirs n’ont pas de sens », elle tourne une complainte étirée et informe pour voix et piano qui se transforme en autobiographie, signée avec la phrase « Seaming, apparemment ». Dans les couplets, To réfléchit sur une vie d’aspirations, pour découvrir que tout était « sans sens, une poursuite du vent, rien de gagné sous le soleil ». Les voix intrépides au premier plan – grognements, halètements et lignes tournoyantes rappelant Meredith Monk – et l’horreur gothique des arrangements obscurcissent ces explorations personnelles tendues.
Les compositions de To sont enracinées dans l’impressionnisme français de Claude Debussy. Sur « Water Flows », elle empile des clarinettes sur sa mélodie vocale fluide et sans paroles. Accompagné de clarinette et de piano, To peint en traits fins aux courbes accentuées sur « Traveller », tandis que « Pleasures are Meaningless », avec sa palette de couleurs délicates et son sens de la nostalgie, évoque les ballades intimes de Bill Evans. Avec ces bases de composition en place, des tas d’effets (overdubs, délais, réverbérations, oscillateurs) peuvent s’effacer en un instant pour révéler une nouvelle profondeur. Après l’ambiance moite de la première moitié de l’album, « xenamax » c’est trois minutes lucides de percussions accordées, de synthés analogiques et d’une machine à trébucher qui sonne comme une corde tendue sur un pont suspendu. À chaque album, To prend de plus en plus le contrôle de chaque aspect de son art, mais elle est aussi une excavatrice exigeante. Alors qu’elle perce les couches superposées de Collecteurs de poussièrece qu’elle trouve au cœur est vulnérable et émouvant de manière inattendue.