Siavash Amini: La sueur de la critique de l’album de la Terre

Siavash Amini fait de la musique d’une complexité presque insondable. Comme un système météorologique, il peut sembler relativement statique de loin, mais à l’intérieur, il tourne. Sur son récent album Eidolon, sorti début juillet, le compositeur basé à Téhéran s’est inspiré d’une gamme de 17 notes formulée par l’érudit du XIIIe siècle Safi-al-din Urmavi. Mais même l’auditeur le plus techniquement habile peut avoir du mal à choisir ces tons. Dans Eidolondu tangage et du lacet sans fin, il n’y a pas de points fixes, pas de bords durs, pas de sol ferme du tout – juste des glissades de mal de mer et un glissement perpétuel.

Le son d’un autre monde de ce disque, dépouillé de tout ce qui est aussi rassurant qu’une triade majeure ou une quinte parfaite, suggère un état interstitiel, plaçant des fréquences inattendues et instables entre des intervalles familiers. Sur son nouvel EP, La sueur de la Terre, un compagnon de l’album, Amini continue d’ouvrir les fissures. Le titre du disque vient d’un poème de l’écrivain mexicain du XXe siècle Xavier Villarrutia. « Nocturnos », une méditation sur l’éros et la mort, tourne son regard vers l’espace négatif, envisageant les formes révélées par les ombres et les sons capturés dans l’immobilité. (« Tout ce que le silence envoie fuir les choses », écrit Villarrutia : « Le brouillard du désir/La sueur de la terre/Le parfum sans nom/De la peau. »)

La sueur de la Terre passe sa course de 18 minutes à la poursuite de sensations tout aussi éphémères. Alors que ses tons sombres et brillants pourraient, à première vue, ressembler à du bruit, en y regardant de plus près, ils s’ouvrent pour révéler une sensualité en accord avec le poème richement imagé de Villarrutia. La pièce commence par une minute de bruit blanc pur, comme de la vapeur sifflant d’une grille, avant d’inaugurer un bourdonnement expansif, une fusion métamorphosée d’avions à hélices, de ruches et de cornes de brume lointaines.

Le son arrive par vagues. Il y a des cycles de crescendo et de dénouement, si lents qu’ils sont à peine perçus comme des répétitions. Dans les moments de plus grande clarté, des grappes de dissonance vibrent à des vitesses contradictoires, à des fréquences impossibles à analyser ; le drone brille comme de l’acier inoxydable bien décapé, une débauche de lignes qui se chevauchent. À son apogée, le grave gronde violemment et la statique de fond augmente en volume jusqu’à ressembler à des caddies dévalant une cage d’escalier. À partir de ce point culminant, la pièce est tendrement plate. Les sept dernières minutes sont un doux plateau de tons de cloche, mais ce qui semble immuable à la surface se hérisse de détails, et plus la pièce est longue et plus elle devient silencieuse, plus ses profondeurs deviennent vives. Le final paradoxal rappelle un autre vers du poème de Villarrutia : « Tout ce que l’ombre/Fait entendre avec le dur/Coup de son silence.